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Prédictions apocalyptiques et prévisions économiques – Numéro spécial de Raisons politiques

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Thomas Angeletti, Arnaud Esquerre, Jeanne Lazarus, dir., 2012, Prédictions apocalyptiques et prévisions économiques, Raisons Politiques.

Ce numéro de Raisons politiques compare les types de discours sur le futur que sont les prédictions apocalyptiques et les prévisions économiques. Le rapport contemporain au temps se caractérise par la volonté de maîtrise et par de multiples façons d’articuler les évènements à venir avec ce temps maîtrisé. Pourtant, si les prévisions économiques témoignent des efforts des institutions publiques et privées pour stabiliser la réalité, les prédictions apocalyptiques, et notamment la dernière en date qui annonce la fin du monde pour le 21 décembre 2012, rappellent la fragilité de la réalité face aux évènements qui pourraient surgir. Prédictions et prévisions sont à penser ensemble car elles sont l’envers l’une de l’autre.


This special issue of Reasons politiques compares two type of discourses on the future: apocalyptic predictions and economic forecasts. The contemporary relationship with time is characterized by the desire to control time and by the multiple ways of articulating events with this controlled time. However, while economic forecasts testify of public and private institutions’ efforts to stabilize social reality, apocalyptic predictions remind the fragility of reality when facing the events that could arise. Predictions and forecasts needs to be thought together because they are precisely two sides of the same coin.

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Economic Forecasting and its “Errors”

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Thomas Angeletti, 2012, « Economic Forecasting and its “Errors” », Raisons politiques, 48.

Around the 1980s, the reshaping of economic forecasting in France was reflected both in the institutions tasked with managing the economic future and in the professional ethos of economists. Focused on state intervention, forecasters at the time had little interest in the impact of their predictive statements. This descriptive and realist culture, implying a distinction between the existence of a phenomenon and its measurement, gradually accorded a greater role to looping effects and came to favor microeconomic analysis. Looking at this period enables us to outline two conceptions of the economy and ways of containing concerns about the future.

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La prévision économique et ses « erreurs »

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Thomas Angeletti, 2012, « La prévision économique et ses “erreurs” », Raisons politiques, 48, p. 51-68.

Autour des années 1980, la recomposition de la prévision économique se manifeste tant dans les institutions en charge de dire l’avenir économique qu’à travers l’ethos professionnel des économistes. Dans les considérations de ces derniers, centrées jusqu’à cette époque sur l’intervention de l’État, la question des effets des énoncés prédictifs est absente. Cette culture descriptive et réaliste, qui implique une séparation entre l’existence des phénomènes et leur mesure, accorde progressivement une place aux effets de boucle et privilégie une approche microéconomique de court terme. Cette période nous permet ainsi de styliser deux conceptions de l’économie et des manières de contenir les inquiétudes sur l’avenir.


Around the 1980s, the reshaping of economic forecasting in France was reflected both in the institutions tasked with managing the economic future and in the professional ethos of economists. Focused on state intervention, forecasters at the time had little interest in the impact of their predictive statements. This descriptive and realist culture, implying a distinction between the existence of a phenomenon and its measurement, gradually accorded a greater role to looping effects and came to favor microeconomic analysis. Looking at this period enables us to outline two conceptions of the economy and ways of containing concerns about the future.

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Dire l’économie. Les « journées de l’économie » comme instance de confirmation

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Thomas Angeletti, 2011, « Dire l’économie. Les “journées de l’économie” comme instance de confirmation », Sociologie, vol. 2, n° 2, p. 113-127, 2011.

Pour étudier les contraintes qui encadrent l’action de l’expert lorsque celui-ci se trouve confronté au regard de personnes différentes des acteurs courants avec lesquels il peut d’ordinaire s’entretenir, les « journées de l’économie » constituent un lieu d’observation privilégié. Orga­nisé à Lyon depuis trois ans, cet événement propose, trois jours durant, des conférences formellement ouvertes à chacun sur un ensemble de thématiques : crise, croissance, développement durable, etc. À partir de l’enquête que nous avons réalisée sur ces journées, nous identifions certaines des conditions qui, en situation, éveillent le regard critique de l’assistance vis-à-vis de l’expert et, parfois, conduisent même à tenter une remise en cause de sa position : possibilité pour les personnes composant l’auditoire de se reconnaître une condition commune ; existence de modes de totalisation permettant d’agréger des plaintes ; nécessité pour l’expert de se définir comme dénué d’intérêts propres et de moyens d’action dans le domaine dans lequel il intervient. Si celui-ci n’emporte pas systématiquement l’adhésion du public, ces journées n’aboutissent pas pour autant, loin s’en faut, à une continuelle mise en doute de l’expert. En ce sens, nous montrons que l’événement repose sur deux présupposés centraux : d’une part, une méconnaissance citoyenne en matière d’économie ; d’autre part, l’existence d’une autorité scientifique susceptible d’y remédier. Dans ce cadre, nous avançons enfin que l’une des dimensions prises par ces journées est de confirmer l’économie, entité suffisamment substantialisée pour que ne subsiste pas de doute sur son existence.


The « Journées de l’Economie » are a vantage point for studying the constraints that govern the actions of the expert when facing people other than those he is used to working with. Held in Lyon for the past three years, this event offers three days of conferences officially open to all on a set of themes: crisis, growth, sustainable development, etc. From the survey we conducted during this event, we identify some of the conditions that allow for the in situ development of a critical stance by the audience toward the expert, sometimes even leading to attempts to question his position. These conditions are: the possibility for the people in the room to acknowledge a shared condition; the existence of summation methods for aggregating complaints; and the need for the expert to identify him-/herself as being devoid of self-interest and lacking means to intervene in the field in which he operates. Even if it does not entail systematic public support, this event far from leads to a continual questioning of the experts. Indeed, we show that the event is based on two central presuppositions: on the one hand, the citizens’ ignorance about economic issues, and on the other, the existence of a scientific authority likely to remedy this. We therefore argue that one of the dimensions that this event assumes is to confirm the economy as an entity substantial enough that no doubt can remain about its existence. 

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Faire la réalité ou s’y faire ? La modélisation et les déplacements de la politique économique au tournant des années 1970

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Thomas Angeletti, 2011, « Faire la réalité ou s’y faire ? La modélisation et les déplacements de la politique économique au tournant des années 1970 », Politix, 95, p. 47-72.

Comment se constitue, se consolide et se déploie une certaine réalité économique ? Cet article étudie la question à travers la situation du Commissariat général au Plan à la fin des années 1960. Si celui-ci occupe alors une place importante dans l’espace politico-administratif, il fait toutefois l’objet de nombreuses remises en cause, en raison particulièrement de la force alors accordée au marché et à la concurrence extérieure. L’introduction dans ce cadre d’un modèle macroéconomique dénommé « FIFI », élaboré par une équipe d’économistes de l’INSEE, s’accompagne de certains déplacements quant au mode de fabrication des politiques économiques et de leurs finalités. Il a ainsi été conçu de manière à dresser un tableau de l’économie française en 1975 si aucune décision n’était prise, afin d’identifier les problèmes économiques à venir et de déterminer les solutions pouvant être proposées. En ce qu’il est un instrument d’attribution de causalités (entre différentes entités telles que le salaire, le chômage ou encore la contrainte extérieure), le modèle FIFI tend à déplacer le type d’imputations sur lesquelles s’appuient les participants au Plan, et notamment les organisations syndicales. Ainsi, ces métrologies économiques n’ont pas pour seule conséquence de faire une réalité chiffrée et relativement autonome ; elles déstabilisent également d’autres formes politiques, celles-ci explicitement fondées sur des valeurs.


How a certain economic reality is made, strengthened, and spread? This article examines the problem through the situation of the French General Planning Commissariat in the late 1960s, which at that time held a key place in the political-administrative area. However, given the force accorded to the market and the external constraint, this institution became increasingly questioned. In this context, a new macroeconomic model called « FIFI », developed by a group of economists at the INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques), introduced some innovations regarding the formulation of economic policies and their bases. The model has been designed to provide a picture of the French economy in 1975 if no decisions were taken, in order to identify future problems which could arise from the trends and to determine the solutions which could be recommended. As it is an instrument that attributes causality (between various entities such as wages, unemployment or external constraint), the FIFI model tends to displace the type of imputations on which the participants of the Plan rely, especially trade unions. Hence, these economic metrologies not only produce a reality, made up of numbers and relatively independent; they also destabilize the political forms that are explicitly based on values.

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(Se) rendre conforme. Les limites de la critique au Conseil d’analyse économique

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Thomas Angeletti, 2009, « (Se) rendre conforme. Les limites de la critique au Conseil d’analyse économique », Tracés. Revue de sciences humaines, 17, p. 55-72.

Cet article se propose d’analyser empiriquement la question de la normalisation des comportements au sein des institutions, à travers le cas particulier du Conseil d’analyse économique (CAE), organisme regroupant des économistes chargés de conseiller le Premier ministre. Doté d’une double exigence formelle de fonctionnement, en proposant, d’une part, une pluralité scientifico-politique dans le recrutement et en valorisant, d’autre part, la confrontation des points de vue, ce conseil se trouve, de l’aveu même de ses membres, dans l’incapacité de générer les débats pour lesquels il a pourtant été créé. Deux facteurs explicatifs sont avancés : 1) nombre de ces économistes évoluent dans des espaces professionnels multiples, signe d’un rapport à la règle suffisamment distancié pour mettre en défaut ceux des participants qui surinvestissent l’institution scientifiquement ou politiquement ; 2) le déroulement normé des réunions au CAE génère des stigmatisations croissantes pour les économistes minoritaires, qui se voient reprocher leur incapacité à s’exprimer dans les formes requises (dépolitisation des débats, respect des grandeurs en présence, comportements réalistes), les amenant même à la défection. In fine, la conduite formellement pacifiée des débats au sein de l’institution doit autant à ses effets propres qu’au cloisonnement général dont la science économique a été l’objet au cours des dernières décennies.


This article proposes to analyze empirically the question of the standardization of behaviors within institutions, through a specific case study of the Conseil d’analyse économique (CAE), an agency which brings together economists to act as an advisory body to the Prime Minister. The CAE is submitted to two formal requirements in terms of its functioning, that is a commitment to scientific and political plurality in its recruitment on the one hand, and a commitment to debate and the confrontation of points of view on the other hand. This council is, however and by the confession of its own members, incapable of generating the debates for which it was created. Two explanatory factors are advanced in this article : 1) many of these economists are involved in multiple professional areas, which ensures distance to the rules and puts in the wrong those of the participants who over-invest in the institution, both scientifically and politically ; 2) The conventional manner in which CAE meetings are conducted increases the stigmatization of minority economists, who are blamed for their incapacity to express themselves in the required forms (depoliticization of the debates, respect for the worth involved, realistic behavior), even leading them to defect sometimes. Finally, the smooth, formally peaceful conduct of the meetings in the CAE owes as much to its own effects as to the general insularity which has characterized economics as a field over the last decades.